Traduire

mercredi 26 juin 2013

Chronique du Nouvelliste du mercredi 26 juin 2013

Drame du Grand-Pont : 10 ans déjà.
Denis Pittet, journaliste *
Est-ce que 10 ans c’est long? Oui et non. Toujours est-il que l’on m’a rappelé l’autre jour que cela fait dix ans – c’était exactement le mardi 8 juillet 2003 à 12 h 30 – que se déroulait à Lausanne ce qui a immédiatement été appelé «le drame du Grand-Pont». Des souvenirs extrêmement précis de cette journée me sont revenus en mémoire. Un premier coup de fil d’un homme qui passait par hasard sur les lieux au moment du drame ; il parlait en pleurant ; c’était confus. Il disait qu’il y avait des morts, du sang partout, une voiture qui avait arraché une barrière du Grand-Pont et était tombée 12 mètres plus bas, sur la place Centrale. Le réflexe d’un responsable de rédaction dans ces cas est d’envoyer immédiatement du monde sur place. Un coup de natel, une pizza commandée et jamais mangée et Yan Pauchard est l’un des premiers journalistes sur les lieux. Je me souviens aussi que son premier retour est imprécis et baigné par l’émotionnel. Mais une chose est sûre : c’est grave, très grave et on doit alors déclencher les grandes manœuvres. Puis au fil des heures, on comprend que ce qui est d’abord vu comme étant un accident – un type a dévié de la route, et monté sur le trottoir, a fauché des piétons et en a emporté avec lui en tombant du pont – n’est pas un accident normal mais peut-être le fait d’un homme qui a perdu la raison. Dix personnes seront touchées, trois meurent dont un bébé et sept sont blessées dont certaines très grièvement. La conjonction majeure entre la violence de l’événement un beau jour d’été, la qualité des victimes, la totale improbabilité d’un tel drame puis les révélations sur l’auteur de ce qui sera d’abord qualifié d’assassinat par la justice font que le drame du Grand-Pont reste et restera à jamais gravé dans la mémoire des Lausannois.

Pareille conjonction s’était produite le vendredi 23 avril 1982. Ce jour-là, une grue était tombée sur un bus et sa remorque à l’avenue de Rumine. Il y avait eu sept morts et des dizaines de blessés. Ce souvenir est lui aussi encore très présent dans ma mémoire.
* Délégué à la communication du département de l’Intérieur vaudois







vendredi 14 juin 2013

Chronique du Nouvelliste du mercredi 12 juin 2013

Lausanne en chantiers
Denis Pittet, journaliste *

Les chantiers vous enchantent? Vous n’avez pas fini de chanter tout l’été (autoroute A9) et vous – nous – chanterez désormais pour plus de dix ans à Lausanne! Où est la nouvelle réagiront immédiatement certains, puisque Lausanne est, depuis déjà longtemps, un chantier permanent ou plutôt une somme de petits et moyens chantiers qui durent chacun très longtemps. Circuler à Lausanne, c’est comme jouer aux dés: vous ne savez jamais devant quelle nouvelle rue fermée pour 6 mois vous allez tomber. Le directeur des Transports publics lausannois le reconnaît d’ailleurs lui-même : ses bus ont du composer – rien qu’en 2012 – avec 325 chantiers ( !) dont 26 ont impliqué des détournements de lignes…

Le sujet est si grave que le grand quotidien vaudois «24 Heures» y a consacré un cahier spécial il y a cinq jours. Damme! L’exercice est bien difficile de vendre positivement aux lecteurs et citoyens des embûches pour dix ans alors que ces mêmes lecteurs et citoyens ont déjà l’impression de les vivre. Ménageant la chèvre et le chou, l’éditorialiste du journal vaudois dit : «Désormais, il faut s’attaquer à la tranche la moins gratifiante de l’édifice. Les axes principaux de communication à travers et autour de Lausanne».

Nouveau tram, nouveau métro, nouveaux bus, nouvelles jonctions, zones piétonnières, places éventrées, artères remodelées, contournement de Lausanne revu : toutes ces manœuvres peuvent être considérées sous deux angles. Le premier: une mue positive et une gestion saine du futur. Le second : la conséquence d’un manque total d’adaptation depuis près de 20 ans. Ce n’est pas faire injure à la vérité de dire que les autorités lausannoises ont «freiné» la bagnole depuis le début des années 90. Un choix politique voulu et assumé. Mais la croissance (habitants, économie, déplacements) et ses conséquences elle, n’a pas cessé. C’est pour cela que désormais il faut faire se rejoindre au prix fort deux courbes qui s’étaient un peu écartées l’une de l’autre…

* Délégué à la communication du département de l’Intérieur vaudois





lundi 3 juin 2013

Chronique du Nouvelliste du mercredi 29 mai 2013

Lausanne et des chiffres
Denis Pittet, journaliste *
Longtemps connu sous le nom très administratif et un peu barbare de « SCRIS » (service cantonal de recherche et d’informations statistiques), devenu aujourd’hui «Statistique Vaud», ce service décortique depuis plus de 40 ans des millions de données concernant la vie des Vaudois. Il travaille main dans la main avec «Statistique Lausanne», qui s’est « appondu» plus récemment à ce train de chiffres qui recèlent et font découvrir des choses toujours passionnantes lorsqu’on les décrypte un peu… Et vous savez les chiffres : on leur fait dire ce que l’on veut.

A cet égard, la dernière livraison de «Statistique Lausanne», dans une série nommée «Lausanne déchiffrée» est des plus intéressantes. Je suis un enfant de Lausanne. J’y suis né, y ai grandit, étudié et j’y travaille depuis toujours. J’ai toujours pensé que Lausanne était une «grande» ville. Officiellement, Lausanne compte 137'500 habitants. C’est donc une petite ville. Longtemps et jusqu’à la fin des années 80, lorsqu’on évoquait le nombre d’habitants de la capitale vaudoise, on donnait en fait le chiffre des habitants avec ses villes de «banlieue» : Pully, Belmont, Epalinges, Lutry, Chavannes, Renens, Romanel, St Sulpice, Prilly, Crissier, Le Mont et pardon pour celles que je ne mentionne pas. Mais n’allez pas dire à un Pullièran que c’est un banlieusard lausannois. Ni dire à un Morgien qu’il est dans la sphère d’influence de Lausanne….

Pourtant, dans leur inconscient collectif, bien des Lausannois appartenaient, appartiennent et font toujours partie d’une agglomération dont on a longtemps dit quelle oscillait entre 200'000 et 250'000 habitants. (330'000 pour Lausanne-Morges). Donc une grande ville. Simplement, un jour, les statisticiens ont décidé de donner le nombre d’habitants exacts sur le territoire, et Lausanne a ainsi passé brutalement de 250'000 habitants à 125'000. De mémoire, je dirais que ce coup d’assommoir date du milieu des années 90. La bonne nouvelle est que Lausanne depuis n’a cessé de reconquérir de nouveaux habitants. La mauvaise est que les natifs purs (16% des Lausannois seulement !) ne savent toujours pas s’ils vivent dans une grande ville ou dans… une petite ville.

* Délégué à la communication du département de l’Intérieur vaudois